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Pour un imâmat au service des Musulmans

Pour un imâmat au service des Musulmans

L’imâm est, étymologiquement, le guide. Celui qui est devant, montre le chemin, précède les autres, le responsable d’un groupe humain. Le terme est utilisé dans le Coran pour désigner les prophètes ainsi que ceux qui ont guidé les croyants après eux. Dans l’entendement commun, il est compris comme celui qui dirige les prières communes, célèbre les mariages et délivre des sermons, notamment ceux du vendredi. S’il est rétribué pour cette fonction dans certains pays, en tant que « imâm-fonctionnaire », en France et dans nombre de pays son salaire incombe parfois aux fidèles mais il est généralement bénévole, n’attendant que d’Allâh sa récompense, ici-bas comme dans l’au-delà. Pour exercer cette fonction, aucun diplôme n’est requis, même si la compétence et la piété restent les qualités à réunir chez celui qui est appelé à éclairer les enseignements de l’islâm.

 

L’imâm devrait être désigné par ses coreligionnaires, les fidèles qu’il connaît et qui le connaissent, qu’il fréquente et aime et vice versa, et non pas parachuté par un groupe de pression politique ou religieux, et encore moins autoproclamé, conformément à l’éthique musulmane qui veut que « l’on ne donne pas le pouvoir à celui qui le demande ». Ce dernier qui cherchera à occuper une telle fonction par ambition, même animé par les meilleures intentions, aura à cœur de satisfaire un projet personnel ignorant ou sans redouter les conséquences de la prise de responsabilités qui lui vaudra le jour J l’humiliation s’il n’a pas été de ceux qui ont craint leur Seigneur en donnant à chacun son droit. Or, le plus savant de la communauté qu’il guide, l’imâm, devrait aussi être celui qui craint le plus Allâh, comme l’affirme le Coran.

 

L’imâm devrait jouer le rôle de dirigeant de la structure qui l’a chargé d’une si importante responsabilité, bénévolement ou contre salaire. C’est dans cet esprit que dans l’islam matinal, le terme était employé pour désigner naturellement le chef de la communauté qui dirigeait aussi les prières à la mosquée, de droit. Occupé par ses lourdes et multiples occupations au sommet de l’État, il se faisait souvent remplacer pour la direction des offices, tout en en gardant la prérogative, notamment lors de la prière des deux fêtes où le message pouvait avoir un impact politique, au sens de gestion des affaires de la communauté dont il est responsable, certain.

 

Si « l’imâm-fonctionnaire » ne saurait prétendre à une fonction autre que cultuelle, dans le contexte de séparation du culte et de l’État, comme en France, l’imâm devrait exercer aussi la direction de l’association qui dirige la mosquée, sous peine d’assister aux nombreux problèmes récurrents inhérents à la direction bicéphale dont beaucoup de mosquées sont coutumières. En effet, au président de ladite association, pas toujours très savant en matière de religion, incombe la charge de gérer les affaires administratives, comme le lui octroie les statuts. Mais, dans les faits, c’est l’imâm qui est reconnu par les fidèles qu’il côtoie plus et aide au quotidien. Malgré donc la « bonne volonté » de ce dernier, il n’est pas rare que des antagonismes naissent, alimentés par les égos et les ragots, chaque fois que l’Adoré est oublié et que Satan s’empare des fils d’Adam.

 

Bien que les deux fonctions ne requièrent pas les mêmes compétences et qualités humaines, l’idéal serait de disposer d’un « imâm-président » bénévole, pour le bien de la communauté, même si cela peut être mal interprété comme étant un « cumul des mandats » ou « soif de pouvoir ».
A défaut du candidat idéal réunissant les compétences à la hauteur des responsabilités, le bon gestionnaire déléguera l’imâmat à plus érudits en matière religieuse, le plus important au final, car la structure n’étant qu’un moyen pour arriver au but, qui n’est que l’agrément divin !
Dans ce contexte, exiger l’agrément d’une structure administrative externe au lieu d’exercice, fusse telle composée de personnes dont les compétences en matière religieuse soient reconnues, est étrangère à l’esprit de l’islâm et loin d’aider à organiser cet islam dit de France.

 

Imposer des imâms aux mosquées suppose que les maisons d’Allâh appartiendraient aux « nominateurs » qui devraient aussi pouvoir rémunérer les officiers du culte, chose impossible dans la durée sans l’intervention active de l’État, réputé pourtant indépendant du culte depuis 1905. De plus, ce serait la plus grande insulte faite aux fidèles qui seraient, encore une fois, traités comme des inaptes, incapables et incultes qui auraient besoin de direction imposée dans des édifices qu’ils ont pourtant eu tant de mal à financer, à construire et à entretenir.

 

Penser qu’en désignant les imâms on résoudrait le problème du « radicalisme » ou de « l’islamisme politique » est la théorie erronée distillée par des instruits, loin d’être savants, à la recherche de succès audiovisuels, populistes ou en librairie ou de subventions imméritées. L’expérience récente prouve, si besoin en était, la fausseté de cette malhonnête manœuvre intellectuelle et l’inefficacité de sa mise en pratique.

 

Ceci n’est pas étonnant parce que cette théorie n’est basée que sur de la «sociologie» dévoyée, et non sur une vraie connaissance des musulmans et de l’islâm, leur religion, qui engage la conscience individuelle devant le Seigneur des mondes et appelle tout individu à prendre ses responsabilités en préparation du jour J, jour où « aucune âme ne pourra rien pour une autre ». L’imâm, à l’instar du Prophète béni, n’a qu’une mission : faire parvenir le message divin dans toute sa clarté. Si tel n’était pas le cas, libre à chacun d’aller le rechercher ailleurs, y compris chez des ignorants qui officient hors mosquées.

 

Laisser les Musulmans des mosquées choisir librement leurs guides, en citoyens responsables, puis les accompagner juridiquement et logistiquement dans la gestion de leurs lieux de vie, tout en encourageant un partage d’expériences et de compétences, est la seule solution raisonnable, viable et respectueuse des Musulmans et de leur religion et de leurs imâms. C’est de ces mosquées et de leurs dignes représentants que l’État, à travers tous ses représentants, trouvera ses légitimes interlocuteurs pour un bien-vivre-ensemble !

 

Crédit photo de la couverture : Trouve Ta Mosquée

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